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La crise sanitaire due à la pandémie que nous vivons aura des conséquences profondes sur le fonctionnement du monde. La réalité est que l’apparition du coronavirus est arrivée alors que le système mondial montrait des signes alarmants sur ses faiblesses et que sa fiabilité était remise en cause.

La dislocation géopolitique était déjà en marche, le Brexit en étant le symptôme le plus apparent concernant l’Europe, qui est, aujourd’hui, dans une spirale de « dé solidarité » et de « dé tricotage ».

La mondialisation et le néolibéralisme sont aujourd’hui au banc des accusés. Les contradictions internes à ces logiques sont devenues insupportables pour les peuples du monde entier. Un retour au nationalisme, parfois au chauvinisme est devenu la panacée des politiques dans les pays qui ont été les chantres de ces idéologies.

A la faveur de la pandémie actuelle, le repli sur l’Etat-Nation devient un fait, les grands ensembles multiétatiques vont se défaire au moins en partie et les nations retrouver une part de leur souveraineté perdue. Le corona a été l’élément déculpabilisant pour déclencher dans les faits le retour vers un statu quo ante.


Dans ces mouvements brutaux de reflux de la mondialisation, le risque d’un effondrement systémique du système financier, d’un désordre économique et commercial international et d’une crise énergétique profonde devient extrême. Des tensions politiques y compris des conflits armés deviennent envisageables.

C’est à l’intérieur de l’univers de ces contraintes que l’Algérie doit penser son avenir.

Que faire ?

Il est impératif d’accélérer les réformes politiques pour assoir une légitimité de la direction du pays et rétablir une unité nationale mise à mal par l’ancien régime,

De consolider l’autorité de l’Etat et de mettre une organisation politique, administrative et sécuritaire au diapason de la demande populaire, soit l’Etat de droit et la démocratie,

D’intégrer dans une structure, au plus haut niveau du pouvoir d’Etat, les domaines de développement à long terme, transcendant les mandats électoraux à tous les niveaux.

L’objectif est de mettre en place des politiques sur 20 à 30 ans touchant aux domaines en rapport avec la sécurité nationale, au sens large (sécurité alimentaire, sanitaire, territoriale, énergétique etc…). Ces politiques devront être approuvées par les dirigeants politiques en un consensus national et ne pas être remises en cause lors des alternances démocratiques.

Avec quels moyens ?

L’Algérie possède des moyens exceptionnels dans tous les secteurs. Elle manque cruellement, par contre, d’une vision à long terme et d’une volonté politique et d’un système de légitimation populaire de ses dirigeants.

Une fois les réformes politiques mises en place, l’appareil d’Etat devra être mobilisé pour accompagner et réguler prioritairement les secteurs productifs primaires (agriculture, agro-industrie, PME/PMI, services), créer un tissu sanitaire fiable, réaménager l’occupation du territoire. L’objectif de survie étant de diminuer le plus vite possible la dépendance aux importations des divers produits dont le pays a besoin.

Au plan financier, l’Algérie pourrait bénéficier d’un rebond inattendu du prix du pétrole dans les prochains mois. En effet, la faiblesse actuelle du prix du baril de pétrole met en très grande difficulté l’industrie du schiste, déjà déficitaire et très endettée, qui risque de ne pas s’en relever au moins pour une bonne partie d’entre elle. Celle-ci concerne plus de 70% de la production américaine. Une fois la reprise économique installée, à la fin de la crise sanitaire, le monde pourrait de nouveau expérimenter la rareté de l’or noir. Les cours du brut remonteront vers des valeurs confortables d’ici un à deux ans au plus tard. C’est dans ce contexte qu’il faut inscrire la politique de certaines puissances pétrolières.

En attendant, l’Algérie doit gérer au mieux la crise sanitaire actuelle et en sortir avec le moins de dégâts possibles. Tant sur le plan humain que sur le plan économique. Des mesures de sauvegarde doivent être prises par le gouvernement pour préserver tout outil productif. Les entreprises non commerciales, tous statuts confondus, doivent être soutenues et aidées. Il est impératif de maintenir fonctionnels les circuits de production même à bas rythme. La reconstruction du tissu industriel devra s’appuyer sur un capital déjà établi.

Il reste que la confiance avec le peuple doit être rétablie et au plus vite. La lutte contre la corruption doit être maintenue, l’ouverture des médias et du champ politique renforcées dans le cadre d’un pacte politique avec l’ensemble de la société politique.

Il est l’heure de travailler pour une véritable union nationale.

Soufiane Djilali سفيان جيلالي

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