C’est à Alger, dans la banlieue Ouest de la Commune de Delly-Brahim où nous transporte l’histoire de ce dernier roman choral de Kaouther Adimi. là où la vie s’écoule paisiblement, dans une ville encore en souffrance à côté de cette cité du 11 décembre 1960* avec son terrain vague que les enfants du quartier ont transformé en terrain de football de fortune.
Cette cité n’est pas une cité populaire, d’abord réservée aux militaires avec des maisons de luxe aux accès goudronnés et réservées aux généraux, elle se distingue par sa particularité d’être le mémorial de l’histoire algérienne dont l’auteure Kaouther Adimi par anecdotes successives vient à rappeler la petite histoire de ce terrain vague inoccupé dont nul ne connaissait sa destination que des générations ont foulé pour y jouer au football. jusqu’à ce jour où deux généraux se l’approprient pour en construire deux belles maisons à tel point que les habitants de la cité qui l’entourent, s’en sentent complètement dépossédés en particulier les enfants que l’auteure nomme « les petits de décembre ». Ceux là mêmes qui vont réagir forcément en s’en prenant aux deux généraux dans une résistance organisée et menée par Inès, Jamyl et Mahdi . Inès est la petite fille Adila, une célèbre résistante de la guerre d’indépendance, Jamyl dont le père a été tué dans un attentat en 2007 et Mahdi dont le père a perdu ses deux jambes lors de la décennie noire. Au point que la tension dans cette petite ville va atteindre son summum et mettre le régime en difficulté. Kaouther Adimi évoque avec subtilité et intelligence évoque les paradoxes de la société algérienne sous l’oppression islamiste où les femmes sont les premières victimes. Une œuvre engagée où la société algérienne est au centre de toutes les turpitudes avec une corruption envahissante dans la résignation obligée des gens. En même temps écrasée par un régime qui a confisqué toutes les libertés y compris celle des terrains où les gamins ne pouvaient rêver que de foot et de champions tant qu’ils restaient vagues. Dans cette indifférence totale de ceux qui ne cessent de grignoter les libertés publiques, les Petits de Décembre se sont habitués les pieds dans la boue à se battre pour la liberté. Difficile de faire face à des enfants qui n’ont rien à perdre… Kaouther ADIMI signe ici un roman sensible, bouleversant et nécessaire sur certaines injustices.
JACKY NAIDJA AVEC INES ILIANA
*Kaouther ADIMI : Née à Alger en 1986. Vit et travaille à Paris. Après son premier roman L’ENVERS DES AUTRES aux éditions Actes Sud paru en 2011, a obtenu le prix de la vocation. Des PIERRES DANS MA POCHE son 2è livre, éditions Seuil 2016 a bénéficié d’un beau succès de la critique. Et NOS RICHESSES aux éditions Seuil 2017, en plus de son succès commercial a été récompensé par le Prix Renaudot des lycéens ainsi que le Prix du Style.
Son dernier roman LES PETITS DE DECEMBRE, est en librairie depuis le 14 Août 2019 paru aux éditions Seuil,256 pages : 18 euros.
*Cité du 11 décembre 1960 : date la grande manifestation populaire pour l’indépendance de l’Algérie.