(Partie 1)
Evénement majeur de la politique étrangère du pays, la création de l’agence algérienne de coopération internationale pour la solidarité et le développement (ALDEC) à vocation africaine, fut annoncée lors de l’ouverture du sommet de l’Union Africaine (UA), le 9 Février 2020, à Addis –Abeba (Ethiopie).
Le chantier de la coopération internationale pour le développement constitue une priorité majeure pour les établissements publics de l’Etat dont l’ALDEC présente une spécificité par rapport à d’autres organismes africains similaires, d’être placée sous la tutelle de la présidence de la république. A cet égard, l’Etat réaffirme la volonté d’instaurer un nouveau mécanisme de la coopération Sud-Sud (CSS) de l’Algérie, pour se mettre au diapason des enjeux décrits dans les Objectifs de Développement Durable (ODD) 2030 de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et dans l’Agenda 2063 de l’UA.
Entre la promotion du panafricanisme d’une part, et le rôle-clé de l’Algérie dans la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et des ODD d’autre part, le lancement de l’ALDEC témoigne d’un aggiornamento politique. En effet, l’Algérie est classée en première position aux niveaux africain et arabe et au 53ème rang au niveau mondial en matière de la mise en œuvre des ODD, selon le rapport global « Sustainable development report 2019 », élaboré conjointement par l’ONG allemande Bertelsmann stifung et le Sustainable développement solutions Network (SDSN), et dont l’annonce a été faite en Avril 2020. C’est dans cette dynamique que l’Etat entend capitaliser sur son leadership : classer les priorités de lancement des projets communs de développement durable en fonction des atouts de chaque pays.
A cet effet, l’ALDEC apporte son concours à l’action de l’appareil diplomatique pour la mobilisation optimale de l’assistance technique et financière extérieure au service du développement national. L’ALDEC s’articule autour de huit domaines : l’économie, le social, la culture, le culte, l’humanitaire, la science, l’éducation et la technique. Ces huit domaines de coopération s’intègrent dans les ODD 2030 et à l’Agenda 2063. En outre, les ODD sont caractérisés par le fait qu’ils sont interconnectés.
La diplomatie et la coopération nouent de forts liens. Elles se promeuvent réciproquement. La rencontre entre les peuples est au fondement même de la diplomatie. Le ministère des affaires étrangères représente la pierre angulaire du gouvernement dans le soutien et le suivi de la mise en œuvre des ODD et de l’Agenda 2063. Cependant, il serait utile de distinguer les deux notions que sont la diplomatie et la coopération.
Dans le cadre de cette analyse, la coopération peut recevoir deux définitions. De l’avis de nombreux spécialistes des relations internationales , la coopération correspond par définition à ‘’ une politique d’entente, d’échange et de mise en commun des activités culturelles ,économiques, politiques ou scientifiques entre Etats de niveau de développement comparable ,ou politique d’entente et d’aide entre Etats de niveaux de développement inégaux’’.*
La définition de la CSS préconisée par le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud (UNOSSC) est ‘’ échange de connaissances et de ressources dans les domaines politique, économique, social, culturel, environnemental ou technique entre pays en développement. Elle peut avoir lieu sur une base bilatérale, régionale, sous-régionale ou interrégionale et impliquer deux ou plusieurs pays en développement.’’
La diplomatie c’est ‘’l’action et manière de représenter son pays auprès d’une nation étrangère et dans les négociations internationales. ‘‘* La diplomatie est un outil de la politique étrangère d’un pays. Une des attributions de l’ambassade est de consolider les relations de coopération entre le pays accréditant et le pays accréditaire. D’une manière générale, les agences publiques* étrangères chargées de gérer les projets de développement distinguent trois principaux types de coopération pour le développement :
1/La coopération gouvernementale : la coopération entre les Etats.
2/La coopération multilatérale : la participation à des organisations internationales.
3/La coopération non gouvernementale : la coopération entre les universités, les ONG…
Or, la différence entre le processus de coopération internationale et celui d’intégration continentale est notable. La coopération internationale est basée sur la souveraineté des Etats, alors que l’agenda 2063 de l’UA vise à consolider l’unité de voix de l’Afrique dans les négociations internationales, grâce à la souveraineté partagée, l’intégration et la mise au point de positions communes africaines. Le tableau indique dans chaque colonne le processus.

Dans le livre ‘’Les Etats-nations face à l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest. Le cas du Bénin ‘’, les observateurs de la scène politique africaine soulignent que les disparités de toutes sortes (géographiques, démographiques….) qui subsistent entre les Etats africains peuvent engendrer des occasions favorables pour stimuler l’investissement, au regard de l’impératif de complémentarité entre les économies. En outre, les accords bilatéraux de coopération entre les Etats membres de l’UA peuvent constituer un outil d’intégration continentale. Parmi les objectifs de l’Acte constitutif de l’UA figurent les moyens de favoriser la coopération internationale et l’accélération de l’intégration politique et socio-économique du continent.
Tout l’enjeu réside dans la consolidation des mécanismes de financement du budget de l’UA, afin de permettre le bon fonctionnement de ses organismes et de ses institutions adaptés aux objectifs de l’agenda 2063 et à la mise en œuvre des ODD.D’où l’intérêt de prioriser le financement qui réponde aux nécessités de la croissance démographique africaine et de l’adaptation au changement climatique. C’est en ce sens que ‘’ La lutte contre les changements climatiques et la promotion du développement durable sont deux faces d’une même pièce : on ne peut parvenir au développement durable sans mener une action pour le climat et, inversement, de nombreux objectifs de développement durable portent sur les facteurs clés des changements climatiques.’’ affirme l’ONU. Dans le même sillage, le parlement européen appelle à considérer la ‘’ diplomatique climatique comme une forme de politique étrangère ’’.
Dans le cadre de la politique internationale, les perspectives de coopération pour le développement sont encourageantes à la suite de la signature en 2018 du cadre de l’UA-ONU pour la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et des ODD, entre la présidence de la commission de l’UA et le secrétariat général de l’ONU. Ce cadre de développement durable conjoint envisage une coordination consolidée entre les deux organisations afin que ‘‘le programme 2030 de l’ONU et le programme 2063 de l’UA soit harmonisés et intégrés dans les cadres nationaux de planification des Etats membres ‘‘ souligne la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique.
Cette dernière note que cette démarche adoptée par l’ONU et l’UA réduira la duplication, appuiera les collaborations avec les partenaires au développement et optimisera la mobilisation des partenaires externes et des ressources internes. D’où l’importance pour l’ALDEC de coordonner avec les départements ministériels concernés, la synergie du programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Agenda 2063. Au vu du potentiel de développement du pays, l’ALDEC édifie un nouveau modèle de coopération sur la base d’intérêts partagés :
La coopération internationale doit se baser sur des liens de coopération non hiérarchiques ,c’est ce qu’indique le Conseil Economique et Social des Nations Unies (ECOSOC) dans les notes politiques du Forum pour la coopération en matière de développement, daté de Février 2015. Il s’agit de construire un partenariat d’égal à égal axé sur les valeurs du panafricanisme que l’ALDEC peut prôner par une feuille de route, laquelle vise à l’affermissement des relations de coopération entre les entreprises économiques publiques algériennes et les universités africaines. Dans ce contexte économique national particulier, l’impact de la fluctuation des dépenses et des recettes globales du budget de l’Etat nécessite une réévaluation des priorités de la politique africaine de l’Algérie.
Lire la suite : l’ALDEC, une approche novatrice pour la coopération régionale dans l’Océan Indien (Partie 2)
Benteboula Mohamed-Salah. Géographe