Au festival Les Nuits Méditerranéennes, Thierry de Peretti a rejoint à Porto Vecchio les archives de ses films, le temps d’un partage. À la suite d’une session du dispositif « Talents en Court » du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) organisée par la Diffusion KVA (association fondatrice des Nuits MED) a destination de jeunes professionnels – autodidactes ou émergents -, Salama s’est entretenu avec le cinéaste.
Avec ses deux premiers films sélectionnés au Festival de Cannes – Les Apaches, pour la Quinzaine des réalisateurs en 2013 et Une Vie Violente, pour la Semaine de la critique en 2017 – Thierry de Peretti, dont la carrière cinématographique a démarré sur les planches, exécute dans sa conversion à la réalisation un parcours hors norme. Si l’on devine que son expérience en tant que comédien joue un rôle dans sa direction d’acteur, pour parvenir à comprendre le motif de sa mise en scène, il faut revenir sur la production de ses films. Il y a les repérages, le casting, le tournage, le montage et, bien entendu, l’écriture du scénario, rédaction mutante en évolution constante sous l’impulsion des imprévus et des heureuses surprises.

Dans le cadre du festival corse itinérant des Nuits MED, de jeunes porteurs de projet ont eu la chance d’accéder, ensemble, à une « masterclass » où Thierry de Peretti a partagé son expérience de la réalisation. À la poursuite de l’intrusion du réel, le cinéaste n’hésite pas à affranchir ses acteurs, confiant de leur capacité à se plier aux contraintes imposées par la présence de la caméra. Devant les notes de tournage qu’il a consciencieusement confié aux bons soins de la Cinémathèque de Corse où se tenait la rencontre, l’ajaccien a illustré pour les jeunes réalisateurs présents la qualité d’archive qu’il attribue au cinéma. Non pas seulement par le récit, mais dans les étapes même de la création du film. Le casting – jusqu’à la figuration – fait un portrait riche de la société d’une région, d’un pays et d’une époque ; chaque phase, aussi changeante soit-elle, laisse des traces : « Le casting, c’est de l’écriture, le tournage c’est de l’écriture, le montage, c’est de l’écriture » résume Thierry de Peretti. Ce désir d’archiver, cette envie de représenter la vérité par le biais de l’œil artificiel de la caméra, on le retrouve dans le choix de ses sujets. Son prochain film s’inspire ainsi du récit autobiographique que Hubert Avoine a co-écrit avec le journaliste de Libération, Emmanuel Fansten : L’infiltré. L’écrivain, ancien employé de l’Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS), y dénonce un système à la légalité douteuse dont il a fait parti pendant six ans au début des années 2010.
Syrine Gouni